Ces libyens qui se battent contre daech

Статия, публикувана в „Пари Мач“, посветена на филма на Румяна Угърчинска.

Paris Match | Publié le 18/11/2016 à 22h30 |Mis à jour le 21/11/2016 à 20h05
François de Labarre

ABDULLAH DOMA / AFP

Le 18 novembre 2016, des soldats de l’armée nationale libyenne à Qawarsha, un quartier de Benghazi qui vient d’être repris aux djihadistes

A 3000 kilomètres de Mossoul, une autre guerre fait rage. De Syrte à Benghazi, les soldats libyens se battent chaque jour contre Daech. Deux films leur rendent hommage.

Le 12 mai 2016, les forces de Misrata et leurs alliés se réunissent pour la première fois sous la bannière de l’armée nationale libyenne. Objectif : Syrte, capitale de l’Etat islamique en Afrique. En quelques jours, ils parviennent à la périphérie de la ville. Le général Mohamed Al-Gasri affirme le 5 juin „ce n’est plus qu’une question de jour pour que la ville tombe„. Mais six mois plus tard, Syrte n’est toujours pas tombé et les Misrati ont perdu 750 hommes. Une poignée de djihadistes retranchés dans un mouchoir de poche continue de les harceler.

© Hakeam El-Yamany

Le 16 novembre 2016 -, des soldats de l’armée nationale libyenne ouvrent le feu à Gwarsha, banlieue Ouest de Benghazi

Plus à l’Est à Benghazzi, L’armée nationale libyenne vient de sacrifier une vingtaine de soldats pour reprendre le quartier de Gwarsha à Benghazi des mains de Daech. „C’était un symbole de la puissance des groupes islamistes , beaucoup d’exécution et de kidnapping avaient lieu dans cette banlieue ouest de Benghazi qu’on appelle la porte Ouest ou Gwarsha, explique le journaliste Hakeam El_Yamany. Les habitants de Benghazi sont très heureux de la chute de Gwarsha, mais l’armée nationale recommande aux habitants déplacés d’attendre avant de rentrer chez eux car une énorme quantité de mines et d’explosifs s’y trouvent depuis le début du conflit il y a deux ans“.

© Hakeam El-Yamany

Un groupe de soldats marque une pause dans la bataille de Gwarsh à Benghazi, le 16 novembre 2016

Dimanche 20 novembre 2016, M6 diffuse dans ‘Enquête exclusive’ un reportage exceptionnel dans l’Est de la Libye. Le reportage co-réalisé par Roumiana Ougartshinska et Solomon Kane révèle les coulisses d’une guerre insidieuse avec des armes de fortune et des munitions rares et le plus souvent menée à l’abri des caméras. On y croise des personnages hauts en couleur, prêts à mourir pour se battre contre l’obscurantisme prôné par leurs ennemis. Car la ville de Benghazi a longtemps vécue sous le joug de djihadistes. Une constellation de groupes imposait jusque février dernier une loi inspirée de celle de l’Etat islamique. Parmi eux, Ansar Al Charia qui mena l’attaque contre la mission diplomatique américaine en 2012 ayant causée la mort de l’ambassadeur Christopher Stevens.

EE Libye

La première image du film produit par Sable rouge production ressemble à une scène d’Easy Rider. Des motard „lookés“ comme les Hell’s Angel descendent triomphalement les faubourgs de Benghazi. Musique à fond, foulards autour du cou, ces motards dont le club était interdit et qui devaient cacher leur moto sous le règne des djihadistes se battent encore chaque jour pour leur liberté. L’un d’eux Tarek Saiti est le plus célèbre démineur de Benghazi. „Issu d’une famille de policiers de Tripoli, il s’est engagé dans la révolution puis a été formé au déminage avant de rejoindre l’opération Karama lancée par le général Khalifa Haftar„, explique Roumiana Ougartchinska.

© Capture écran / M6 Enquête exclusive

Le démineur de Benghazi Tarek Saiti profite des dernières heures de liberté sur sa moto, ici pendant l’été 2016, avant de mourir au combat face à Daech

„Quand on le cherchait on ne savait pas que c’était un motard. On voulait le rencontrer parce que c’est une célébrité locale. Il nous a donné rendez-vous avec ses copains du „Motor’s Club“. On a découvert un „Rasta“ surnommés le „diable“ et on a accompagné sa virée en moto. Cette parade un défi parce qu’il y a des bombardements à quelques kilomètres et c’est une façon pour eux de célébrer a liberté retrouvée.“

© Capture écran / M6 Enquête exclusive

Hejba dans son garage à Benghazi en juillet 2016, l’ancien collectionneur de voitures rafistole des chars d’assaut

Liberté fragile. Deux semaines après le tournage, Tarek est mort. „De tous ceux qu’on a filmé pendant le tournage, une dizaine ne sont plus là“, raconte Roumiana Ougartshinska.

La journaliste Roumiana Ougartchinska

Autre personnage haut en couleur, Hejba est garagiste mécanicien et collectionneur de voitures anciennes. „Avant la guerre, il organisait des rallyes de vieilles voitures, aujourd’hui, il rafistole des carcasses de camions et monte un blindage pour en faire des chars d’assaut qui percent les lignes.“ L’équipe d’Enquête exclusive en fait l’expérience, traversant une ligne ennemi dans un Cheval de Troie en ferraille. La séquence vaut le détour. Le film dresse une panoplie de héros, comme ces combattants ou les gradés qui ne rentrent jamais chez eux, dorment dans leur bunker comme le général Manfour Mohamed.

Roumiana Ougartchinska aime les histoires compliquées. Elle est l’auteur de „la vérité sur l’attentat contre Jean-Paul II“ (Ed. de la Renaissance), une enquête fleuve sur l’une des affaires les plus complexes de l’histoire contemporaine, dans laquelle une trentaine de services de renseignement étaient impliqués -selon le juge Rosario Priore-.

Florent Marcie

Le film de Florent Marcie „Tomorrow Tripoli“ sera diffusé au Jeu de Paume mardi 22 novembre à 18h

Depuis 2011, la journaliste a jeté son dévolu sur la Libye: une autre histoire compliquée. Dans son ouvrage „Pour la peau de Kadhafi“ (Ed. Fayard, 2013), on apprend entre autres comment le Qatar avait prévu bien avant le printemps arabe de renverser le régime de Kadhafi en Libye.L’ex chef des services de renseignements extérieurs bulgares Kirtcho Kirovraconte à l’auteur une rencontre avec son homologue qatari en avril 2010. La scène se passe donc moins d’un an avant les révolutions arabes. Le Qatari demande au Bulgare s’il peut fournir des armes et entrainer les opposants à Kadhafi. „On ne peut plus tolérer Kadhafi en Libye“, lui dit-il. Kirov fait remonter l’information et n’a plus eu de nouvelles. Kadhafi en aura…

Dans un style beaucoup plus cinématographique, le Jeu de Paume à Paris diffuse mardi 22 novembre „Tomorrow Tripoli“. Ce documentaire exceptionnel rarement diffusé est réalisé par Florent Marcie. Il offre une plongée dans les brigades de Zintan,  héros de la révolution qui eux aussi durent payer un lourd tribu dans les récents conflits. Le film sera diffuser en présence de son réalisateur qui a passé plusieurs mois à le tourner et encore plus pour monter ce film d’une durée 3 heures.

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